Les débats qui enflamment les élus locaux sur la réforme territoriale doivent apparaître comme bien loin de certaines réalités des chefs d’entreprise confrontés, au quotidien, à la bataille de la compétitivité et à la conquête de nouveaux marchés.Fort heureusement, ces derniers n’ont pas attendu nos débats sur les frontières administratives pour les dépasser et se développer en France, en Europe et sur la planète entière.
Je constate, d’ailleurs, qu’au cours des nombreuses rencontres que j’ai avec des dirigeants d’entreprises, la question des frontières de la Bretagne au-delà de la Loire Atlantique n’apparaît jamais comme un des premiers sujets de préoccupation.
Pour autant, le monde économique doit faire entendre sa voix. La réforme territoriale ne doit pas se réduire à un débat entre élus ou « spécialistes » du sujet. Imaginez-vous construire une stratégie d’entreprises sans prendre en compte les attentes de vos clients et de l’ensemble des parties prenantes ?
La proposition mise en débat par le Président du Conseil régional, Pierrick Massiot, est double. Elle propose à la fois un territoire, c’est la Bretagne à 5 départements, et une nouvelle organisation simplifiée, c’est l’assemblée de Bretagne. Elle recherche à la fois l’efficacité et la démocratie. L’efficacité, c’est la proposition de création de l’assemblée de Bretagne en lieu et place des conseils généraux et du Conseil régional. L’objectif est de simplifier en réduisant les échelons mais aussi de s’interroger sur la façon dont nous voulons mener et mesurer nos politiques publiques. Tous les chefs d’entreprises qui ont eu à demander un soutien public comprennent de quoi nous parlons. Est-il logique aujourd’hui de devoir remplir autant de dossiers de demande d’aides que de collectivités pour un seul projet de développement ?
La démocratie c’est considérer que la cohésion entre les citoyens d’un territoire est primordiale. Partager un sentiment d’appartenance est un atout démocratique mais aussi un atout économique, chacun le sait bien dans son organisation. Avoir une culture commune, défendre une identité singulière est un atout dans la mondialisation. Il suffit pour s’en convaincre d’observer le montant des dépenses, autant dans les entreprises que dans les collectivités, pour se construire une marque. En Bretagne, nous avons la chance d’en avoir une, profitons-en ! La Bretagne à 5 départements permettra à la fois d’avoir une région majeure dans le domaine du numérique, de la mer, de l’industrie, de l’agroalimentaire, sans pour autant diluer cette force de cohésion que représente l’identité bretonne.
Une autre façon de le dire est de considérer que nous devons d’abord approfondir notre organisation démocratique, c’est à dire la rendre accessible à tous les citoyens, en faire un outil efficace, loin de toute technocratie, avant de vouloir l’élargir. C’est cela la véritable réforme à mener : construire une collectivité à taille humaine qui sait apporter des réponses simples aux questions posées, plutôt que d’imaginer des mécanos technocratiques dont personne ne visualise bien les limites. A ce titre, les résultats aux dernières élections européennes peuvent nous inspirer.
Loïg Chesnais-Girard, vice-président à l’économie et l’innovation du Conseil régional de Bretagne