Bercés par les sirènes populistes et une propagande active, les Bretons sont parfois peu informés du programme concret du Front National. Or, parmi les diverses mesures, Marine Le Pen a affirmé la nécessité de « supprimer les Régions ». Concrètement, cela signifierait alors la suppression de la Bretagne, jusqu’à son nom.
Cette mesure surréaliste n’a été que peu évoquée par les autres tendances et partis politiques, eux aussi de tradition jacobine. De toute façon, le pouvoir des Régions est en France si faible. Les supprimer ne serait qu’un pas de plus. Après tout, la droite a toujours été très départementaliste. Sous la mandature Hollande, la réforme régionale présentée comme « la grande affaire du quinquennat » (sic) s’est même révélée être la grande farce du gouvernement. Malgré les promesses, l’unité bretonne a une nouvelle fois été bafouée. Ailleurs, comme pour mieux noyer le poisson, on a donné des noms grandiloquents et pompeux sans rien changer au système centraliste. Les gens du Nord habitent désormais les « Hauts de France » (les Provençaux ont échappé au Bas !) et cela leur fait une belle jambe. La « réforme » régionale a accouché d’une souris. Les copains énarques de François Hollande (la fameuse promotion Voltaire) ont sans doute constitué le gouvernement le plus parisien et centraliste depuis la seconde guerre mondiale. On a vu le résultat.
Avec le Front National et Marine Le Pen au pouvoir, on franchirait un cap supplémentaire. La Bretagne serait supprimée. Concrètement, le Front National veut donc en revenir à l’organisation exclusive en date de 1790 (Etat, département, commune). Plus de province. Pas même de région. Bonjour le pouvoir des Préfets. Bigre !
Pourtant, lorsqu’on demande aux Bretons les territoires qu’ils jugent pertinents, 88 % d’entre eux pensent que la Bretagne a un sens et disent qu’ils y sont attachés. A priori, au vu de la fronde pour l’écotaxe, peu de Bretons regrettent aussi que les voies expresses soient ici gratuites, le fait que leurs cultures soient a minima prises en compte, la régionalisation des lycées ou des TER (le FN organisera-t-il les trains à l’échelle départementale ?). De même, bien que l’Europe soit aussi l’objet de critiques parfois justifiées, ils restent pour lors plus attachés que les autres à cette entité qui, ne l’oublions pas et malgré toutes les limites de l’Institution, a permis pour la première fois au monde d’avoir un continent pacifié depuis 70 ans. Il y a juste cent ans, de nombreux jeunes Bretons étaient à Verdun en train de s’entretuer avec des Allemands. On dira que c’est un détail.
Dans ce cas, chacun peut alors qualifier de « détail » différentes horreurs. Et le FN, par le passé, ne s’en est pas privé. La France, la France, la France. Le FN joue la carte de l’affolement et de l’identité exclusive et totale, sinon totalitaire. Il lave encore plus bleu-blanc-rouge que d’autres. Soixante ans de lutte patiente pour obtenir pas à pas un début de régionalisation que personne ne regrette serait d’un trait de plume effacé.
La Bretagne alors ? Soyez tranquille. On n’en parlera plus ! Elle est, selon le programme officiel de Marine Le Pen, programmée pour ne plus exister.
Le Comité de Rédaction