1/ Quels sont, selon vous, les arguments essentiels qui plaident aujourd’hui en faveur de la réunification de la Bretagne ?
Nous devons tout à la fois concilier développement économique, cohésion sociale et préservation de l’environnement. La Région, singulièrement la Bretagne, apparaît comme un échelon adapté pour anticiper les mutations, favoriser le dialogue social (je salue la création d’une conférence sociale régionale), réussir la transition énergétique. Mais quelle Région ?
Celle à qui l’Etat et les Conseils généraux auront transféré les compétences qu’il est plus pertinent d’exercer à l’échelle d’une région forte, celle qui respectera les intercommunalités nées de la volonté des communes de faire ensemble ce qu’elles ne peuvent plus faire seules (selon le principe de subsidiarité). Quid de la Bretagne ? Elle a prouvé par le passé, lointain et proche, qu’elle était capable de se retrousser les manches pour rester maître de son destin. L’union fait la force et sortir durablement de la crise impose aux collectivités locales de faire plus lisible, plus efficace et moins coûteux pour les finances publiques et les contribuables.
2/ Comment appréhendez-vous la réforme territoriale ?
J’en veux au gouvernement d’avoir commencé par abroger la loi de 2010. La méthode était pourtant la bonne et l’Assemblée unique de Bretagne que d’aucun appellent désormais de leurs vœux étaient à portée de vote ! Suppression de la clause de compétence générale pour les départements et les régions, clarification des compétences de chaque échelon, réforme des finances locales. C’était une belle mission confiée aux conseillers territoriaux qui allaient siéger dans les Conseils généraux et au Conseil régional ; ils allaient pouvoir conduire le changement, dans l’intérêt général. Au passage, le nombre d’élus diminuait et les collectivités revisitaient totalement leur mode d’organisation pour gagner en efficience. Où en sommes-nous aujourd’hui ? Point d’acte 3 de la décentralisation. Une loi sur les métropoles dont l’impact sur l’aménagement du territoire ne manque pas d’inquiéter. Un redécoupage des cantons totalement absurde au regard des bassins de vie. Une nouvelle carte des régions « provocatrice » avant même d’avoir débattu de la répartition des compétences entre l’Etat et l’Europe d’une part, l’Etat les collectivités d’autre part, les collectivités entre elles enfin !
3/ Que s’est-il passé en débat à l’Assemblée nationale ?
Je ne reviendrai pas sur la façon dont la nouvelle carte des régions a été élaborée. Peu glorieux. Demandez aux Alsaciens ! Je m’arrêterais juste sur le traitement qui a été réservé à notre Bretagne. Je n’arrive toujours pas à comprendre comment, avec deux ministres socialistes au gouvernement et toutes ces déclarations d’élus locaux et nationaux siégeant dans la majorité présidentielle, l’arbitrage fut celui du… statu quo. Quelle occasion manquée ! Et oser se réfugier derrière la création d’un droit d’option pour laisser croire que des départements auraient le droit de choisir leur région de rattachement relève de la filouterie. Les conditions sont telles (obtenir les 3/5 des voix de la Région d’origine) que ce droit d’option a une probabilité nulle d’être activé.
4/ Quelles sont selon vous les stratégies à mettre en œuvre désormais ?
Si les positions défendues par les parlementaires au niveau local se traduisaient effectivement dans leur vote au Parlement, nous ferions déjà un grand pas ! Pour ce qui concerne les députés Ump, nous ne nous sommes pas dérobés. Des engagements ont été pris par le Président de la République et le Premier Ministre dans le cadre du fameux Pacte pour la Bretagne censé calmer la colère des Bretons il y aura bientôt un an. Nous devions être terre d’expérimentation de plusieurs mesures de simplifications administratives et même de transferts de compétences… Les actes ont-ils à ce jour suivi les discours apaisants, voire anesthésiants ? Pour l’avenir, je souhaite personnellement que nous travaillions collectivement et surtout concrètement, si possible au-delà des clivages partisans, sur la faisabilité d’une Assemblée de Bretagne, en associant étroitement tous ceux qui font la Bretagne et lui procurent son énergie : les hommes et les femmes de la « société civile ». C’est le meilleur service que nous autres élus devons rendre à nos concitoyens. A défaut, ils se tourneront vers les extrêmes.