Pétri de contradictions, le discours gouvernemental manque cruellement de clarté sur ce qui devait s’imposer comme l’une des réformes majeures de ce quinquennat : la réforme territoriale.
Simplifier la carte administrative, mieux répartir les responsabilités des collectivités, réconcilier les Français avec la politique et, enfin, assainir nos finances publiques, tels devaient être les enjeux majeurs de cette réforme. Mais à l’espoir d’un changement concret de notre organisation territoriale a succédé aujourd’hui une amère désillusion… Oubliée, la mise en extinction des Conseils généraux, enterré le projet tant espéré d’une réunification de la Bretagne à cinq départements. Et lorsque la majorité n’a pas choisi le statu quo, c’est pour imposer un redécoupage arbitraire, faisant fi de toutes réalités culturelles et historiques.
Pragmatique et inclusive, telle aurait dû être la démarche privilégiée par le Gouvernement. Une réforme pour les territoires, par les territoires, avec les territoires !
La priorité des pouvoirs publics doit être de bâtir ‒ en concertation étroite avec les élus et les collectivités ‒ des stratégies territoriales ambitieuses et durables. Pour ce faire, il importe de valoriser les potentialités de nos régions et de concentrer nos efforts sur leurs avantages respectifs. Cette approche originale, à la fois géographique et sectorielle, pourra, j’en suis convaincu, sortir la France de sa torpeur et de son immobilisme actuel.
La décentralisation n’est pas une fin en soi. Elle est plutôt le point de départ d’une stratégie de reconquête territorialisée, ouverte à toutes les forces vives de la Nation.
Aussi, il convient de valoriser deux échelons essentiels : les régions organisées autour de leurs différents bassins de vie et les intercommunalités à une dimension locale. Aux premières serait dévolue la mise en œuvre des stratégies économiques, de l’aménagement du territoire, du développement des infrastructures portuaires, ferroviaires et routières, de la formation, de la culture et du tourisme. Aux secondes reviendrait la gestion de l’école et de l’action sociale, sans oublier le sport et l’écologie. Seule une organisation simplifiée parviendra en effet à rendre l’administration française plus efficace et plus lisible.
Parce qu’elles sont les premières à être impactées par le changement, les collectivités territoriales devraient pouvoir disposer d’un droit de regard sur leur propre avenir. C’est pourquoi je revendique un droit à l’expérimentation et à l’innovation ! Celui-ci doit se traduire par la mise en place d’un droit d’option simple afin de permettre à un département de rejoindre une région qui lui est limitrophe. Nous devons également créer un conseiller territorial, qui puisse, à l’instar d’un médiateur, organiser des concertations entre les différentes collectivités et définir de nouveaux schémas de compétences.
Parfois insoumise mais toujours engagée, la Bretagne a été depuis des décennies une terre d’expérimentations et de projets. C’est pourquoi, notre région doit se positionner à l’avant-garde du renouveau territorial. Au regard de son histoire, la région Bretagne a vocation à englober le département de la Loire-Atlantique. Cette réunification n’a que trop tardé et le déni de la République à ce sujet est devenu insupportable à beaucoup de nos concitoyens.
Telle une main tendue vers l’horizon, la Bretagne constitue un trait d’union idéal entre l’Europe continentale et le reste du monde. A ce titre, elle pourrait devenir une euro-région de premier plan au centre de l’Arc Atlantique. Comme l’écrit avec brio le romancier Yann QUEFFELEC, « la Bretagne est une île, une grande île entourée par l’histoire de France, au pays d’Armor, la pointe aiguë du socle européen ».
Ce rôle d’interface doit s’intégrer dans une réforme globale de l’Etat. Il est temps aujourd’hui de redessiner la France de demain : Une France des projets, des idées nouvelles et des territoires ! Une France décentralisée, démocratique et respectueuse du principe de subsidiarité qui permet au citoyen de peser sur son avenir. De la pointe du Raz aux bouches de Bonifacio, des cimes des Pyrénées aux dunes de Dunkerque, ce vaste mouvement de reconquête territoriale porte de belles promesses pour peu qu’on lui donne sens.
Thierry BENOIT
Député d’Ille-et-Vilaine